L’architecture bioclimatique d’aujourd’hui est la redécouverte des principes de construction qui permettaient aux bâtisseurs d’autrefois de composer avec le climat. Elle recherche un équilibre entre la conception et la construction de l’habitat, son milieu (climat, environnement,…) et les modes et rythmes de vie des habitants. L’architecture bioclimatique permet de réduire les besoins énergétiques, de maintenir des températures agréables, de contrôler l’humidité et de favoriser l‘éclairage naturel.
Elle utilise l’énergie solaire disponible sous forme de lumière ou de chaleur, afin de consommer le moins d’énergie possible pour un confort équivalent. Elle vise également à protéger la construction des vents et pluies froides. Elle s’appuie sur l’emplacement, l’orientation, l’isolation et l’agencement des pièces ; il s’agit pour les constructeurs d’allier, par ces biais, l’architecture au contexte du climat local.
Une démarche bioclimatique se développe sur trois axes : capter la chaleur, la stocker/diffuser et la conserver.
L’architecture bioclimatique s’appuie donc sur des grands principes :
Penser la maison dans son environnement
Orientation et implantation
La maison sera orientée au Sud en exposant au rayonnement solaire un grand nombre de surface vitrées. Idéalement, l’emplacement privilégié est sur l’adret (face sud d’une colline ou d’une montagne), à mi-chemin entre le fond de vallée, où elle verra peu le soleil et le sommet, où elle sera constamment balayée par les vents.
Le soleil doit avoir accès aux façades de la maison, il s’agit donc d’éviter les masques et ombres portées : ne pas construite trop près d’un immeuble ou d’une forêt.
Il faut compter une distance entre l’élément qui fait de l’ombre (immeuble, forêt,…) et la maison supérieure à deux fois la hauteur de l’élément qui fait de l’ombre.
La maison sera protégée des éléments froids du climat : pluies et vents du Nord. On peut s’abriter derrière un talus, une haie d’arbres persistants ou enterrer la face Nord de la maison et ainsi bénéficier de la protection du sol : une température constante été comme hiver, idéal pour une cave. On limitera les ouvertures et les pièces de vie sur le coté Nord de la maison.
Agencement des pièces
Les pièces à vivre seront situées au Sud, afin de bénéficier de la lumière naturelle et des apports de chaleur ; tandis que les pièces peu utilisées serviront d’espace tampon, au Nord, entre l’extérieur et les pièces de vie.
On pensera également à équiper l’entrée principale d’un sas qui limite la sortie de l’air chaud en hiver par le simple fait d’ouvrir la porte. Le sas est aussi utile en été puisqu’il empêche l’air chaud d’entrer dans la maison.
Formes et volumes
La maison bioclimatique est de forme simple et compacte. En effet, plus la maison est compacte, plus la surface en contact avec l’extérieur est petite, plus les déperditions thermiques sont limitées, plus les consommations d’énergie sont faibles.
Capter la chaleur
Confort d’hiver
Durant la saison fraîche, la maison bioclimatique capte la chaleur solaire.
En hiver, sous nos latitudes, le soleil se lève au Sud-Est et se couche au Sud-Ouest. Il reste bas sur l’horizon, tout au long de la journée. Pour capter un maximum son rayonnement, les vitrages doivent être orientés au Sud.
Le verre laisse passer la lumière solaire et il absorbe la chaleur solaire sous forme d’infrarouge. Ainsi, il piège la chaleur solaire à l’intérieur de la maison, c’est ce que l’on appelle l’effet de serre.
Les vitrages sont doubles et peu émissifs (ou faible émissivitée), c’est-à-dire qu’ils laissent rentrer les infrarouges mais ne les laissent pas ressortir grâce à une couche invisible d’oxydes métalliques judicieusement placée. Ils peuvent aussi être rempli d’Argon, ce gaz lourd isolera mieux que l’air.
On peut également prévoir une serre ou une véranda, coté Sud, pour renforcer l’effet de serre en saison fraîche.
Ce concept est appelé solaire passif : solaire car la source d’énergie est le soleil, passif car le système fonctionne seul sans aide mécanique.
Une fois l’énergie solaire captée, il va falloir la stocker puis la distribuer dans la maison.
Confort d’été
Durant la saison chaude, la maison bioclimatique doit se protéger des surchauffes.
Sous nos latitudes, en été, le soleil se lève au Nord-Est et se couche au Nord-Ouest. Il est haut dans le ciel à midi. Pour éviter que le rayonnement solaire pénètre dans la maison, il va falloir camoufler les vitrages derrière des volets, des casquettes de toit calculées en conséquences, des pergolas végétales ou encore des brises soleil. Vous pouvez planter des arbres à feuilles caduques, qui ombrageront la façade Sud de la maison en été et laisseront passer les rayons du soleil en hiver.
La casquette de toit protège la maison des rayons estivaux les plus chauds
Lorsqu’il se couche, le soleil d’été est encore très chaud. De plus, il est bas sur l’horizon et ses rayons passent sous les brises soleil et casquettes de toit. Pour les arrêter, optez pour une barrière végétale à l’Ouest qui rafraîchira l’atmosphère en fin de journée, ou fermez les volets (cf figure Confort d’hiver).
Stocker la chaleur
Une fois la chaleur captée, l’objectif est de la stocker pour pouvoir l’utiliser quand on en aura besoin. Ceci est possible grâce à deux principes complémentaires :
- L’inertie des matériaux
- L’isolation.
L’inertie des matériaux
Derrière les surfaces vitrées qui captent la chaleur, la maison bioclimatique est pourvue de dalles ou de murs denses, constitués de matériaux à forte inertie thermique (béton, pierre, terre,…).
Briques de terre crue | Mur de briques remplies de sable |
Ils emmagasinent une grande quantité de chaleur le jour et la rediffusent la nuit ou en période froide. Ils permettent de lisser la température intérieure de la maison dans le temps, évitant les pics de chaleur en journée puis les chutes de température la nuit. C’est un avantage aussi bien pour les personnes qui vivent à l’intérieur de cette maison, que pour le système de chauffage qui fonctionne de façon constante et non par à coup.
Mur de pierre
Ces éléments doivent être de teinte plutôt foncée sinon ils réfléchiraient la lumière sans la convertir en chaleur. Ils ne doivent pourtant pas être trop sombres au risque que leur surface s‘échauffe énormément et atteigne des températures qui peuvent devenir dangereuses pour les occupants. Une teinte brune ou terre cuite est un bon compromis entre les performances thermiques et le rendu esthétique.
Plus la masse du matériau est importante, plus il pourra absorber par inertie une quantité d‘énergie importante, l’objectif étant de capter pendant la journée suffisamment d‘énergie pour la rediffuser pendant toute la nuit. C’est le véritable radiateur de la maison; il fonctionne à basse température, un peu comme un plancher chauffant, et rayonne sa chaleur sur toute sa surface.
L’isolation thermique
L’isolation thermique est un élément indispensable au bon fonctionnement d’une maison bioclimatique. Elle empêche la chaleur de sortir de la maison.
On isolera en priorité la toiture, qui représente entre 30 et 40% des déperditions thermiques d’une maison, mais les murs, vitrages et planchers bas ne devront pas être négligés.
Il faudra porter une attention particulière aux ponts thermiques.
Isolation en ouate de cellulose | Isolation en paille |
En France, l’isolation thermique est généralement placée à l’intérieur. Dans ce cas seul le volume d’air est chauffé, et les ponts thermiques ne sont pas éliminés. Alors que placée à l’extérieur, comme une seconde peau, l’isolation thermique permet de conserver l’inertie des murs et traite les ponts thermiques. On peut également construire les murs avec des matériaux isolants, tels que la paille ou la brique à isolation répartie de 50 cm.
On utilisera également des systèmes d’occultations extérieurs (volets) pour les nuits hivernales.
Isolation chaux-chanvre | Isolation répartie en brique monomur |
Diffuser et réguler la chaleur
Pour obtenir un confort agréable, la chaleur doit être distribuée dans toute la maison. La ventilation est indispensable, particulièrement dans une maison bien isolée, car l’air doit être renouvelé et l’humidité doit être évacué.
La ventilation a pour vocation d’évacuer l’air vicié des logements en le renouvelant par de l’air frais. L’air vicié est extrait des pièces d’eau : cuisine, salle de bain, toilettes. L’air frai est insufflé dans les pièces de vie : salon et de nuit : chambre.
La ventilation mécanique désigne tous les dispositifs motorisés d’évacuation ou d’insufflation d’air frais.
En faisant entrer de l’air frai dans la maison, la ventilation mécanique provoque une perte de chaleur de l’ordre de 2 000 kWh/an. Pour limiter ces déperditions, plusieurs solutions existent.
- La VMC hygroréglable est une VMC simple flux dont les bouches d’extraction modulent le débit de ventilation en fonction de l’hygrométrie. Le débit d’air varie en fonction des besoins réels, d’où des économies de chauffage.
- Le principe de la VMC double flux est de réchauffer l’air neuf introduit dans le logement en récupérant la chaleur de l’air évacué. L’économie sur les pertes d’énergie est de 70%.
VMC Double Flux | Entrée d’air d’un puit canadien |
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- Une autre solution consiste à supprimer les bouches d’entrées d’air de votre pièce principale et de les remplacer par l’arrivée d’air d’un puit canadien. Le système préchauffera l’air extérieur lors de son cheminement sous terre et servira également à rafraîchir la maison l’été.
- Si vous disposez d’une véranda, faites les entrées d’air au niveau de la véranda ainsi qu’entre la véranda et la maison. L’air extérieur sera préchauffé par la véranda.
Pour répartir la chaleur captée dans les pièces de vie à toute la maison, une circulation d’air à l’intérieur de la maison doit être prévue.
Pour rafraîchir la maison en été, il s’agit d’aérer la nuit de façon à évacuer à l’extérieur la chaleur stockée pendant la journée.
Investissement économique
L’investissement économique d’une construction bioclimatique est très limité, et rapidement compensé par les économies réalisées sur la facture énergétique : jusqu’à 40%. Une énergie d’appoint est cependant nécessaire, particulièrement pour les journées non ensoleillées.
Cette énergie d’appoint peut être évité en renforçant les aspects d’isolation thermique. En effet, les maisons passives sont sur-isolées et atteignent des performances thermiques très élevées (consommation inférieure à 15 kWh/m²/an). Elles n’ont alors pas besoin de système de chauffage.
Cycle de vie
Pour réellement limiter l’impact environnemental de la construction, il faut prendre en compte le cycle de vie des matériaux utilisés. On parle alors d’éco-construction, en alliant les qualités thermiques des matériaux à leur impact sur l’environnement : quelles ressources ont été utilisées pour leur fabrication (eau, énergie, matière première renouvelable,…) ? Quelle distance le produit va-t-il parcourir jusqu’à ma maison ? Quel contenu et quelles émissions va-t-il rejeter pendant sa vie ? Quel recyclage en fin de vie du matériaux ?…
Face aux particularités de chaque habitat, des exigences et des priorités personnelles, il existe une multiplicité de réponses. Chaque construction bioclimatique prend en compte les possibilités et les contraintes en jeu, tout en tenant compte de l’écobilan final, c’est-à-dire du cycle de vie complet des matériaux et techniques mis en œuvre lors de la réalisation, de l’utilisation puis de la destruction de la maison.
Bibliographie consultable à Polénergie antenne Nord :
La conception bioclimatique, Samuel Courget et Jean-Pierre Oliva, Ed Terre vivante
Le guide de la maison solaire, Edward Mazria, Ed Parenthèses
Manuel de construction écologique, Clarke Snell et Tim Callahan, Ed La plage
Maisons écologiques d’aujourd’hui, Jean Pierre Oliva, Antoine Bosse-Platière et Claude Aubert, Ed Terre vivante
Guide des énergies vertes pour la maison, Patrick Piro, Ed Terre vivante
Les matériaux naturels, Jean-françois Bertoncello et Julien Fouin, Ed du Rouergue
L’habitat écologique, quels matériaux choisir ? Friedrich Kur, Ed Terre vivante
Construire sain et naturel, Monique Vincent-Fourrier, Ed Ouest-France
Bâtir écologique, Emmanuel Carcano, Ed Terre vivante