Quand la lutte contre la précarité énergétique s’invite au Grenelle…
Bien que n’ayant pas encore de définition “officielle” en France, la précarité énergétique n’en est pas moins un phénomène inquiétant : si l’on s’en tient à sa définition britannique, selon laquelle tout ménage consacrant plus de 10% de ses revenus disponibles au règlement de ses factures énergétiques (hors déplacement) est potentiellement en situation de précarité énergétique, ce sont plus de 3 400 000 foyers qui seraient concernés en France (source INSEE).
Dans l’attente de l‘élaboration d’une définition française et de la mise en œuvre des mesures qui l’accompagneront, la précarité énergétique peut être caractérisée comme étant le résultat de la combinaison de trois facteurs principaux : de faibles revenus, la mauvaise qualité thermique des logements et le coût de l‘énergie.
Devant l’ampleur du phénomène, les acteurs politiques semblent enfin se préoccuper de cette question au plus haut niveau : ce début de prise en main s’est matérialisé, dans le cadre du Plan Bâtiment du Grenelle de l’Environnement, par la mise en place d’un groupe de travail spécifique dont les conclusions ont été rendues publiques le 6 janvier 2009.
Par ailleurs, le Président de la République a annoncé le 14 décembre dernier que l’Agence Nationale de l’Habitat (ANAH) serait dotée de 500 millions d’euros supplémentaires sur cinq ans pour permettre de financer la rénovation thermique des logements privés énergivores abritant les ménages les plus modestes. L’allocation de cette somme sera discutée le 20 janvier prochain en Conseil des Ministres.
Faut-il s’en satisfaire ? La réponse est non à en croire les simulations financières effectuées par les membres du groupe de travail, qui préconisent un investissement de près de 4 milliards d’euros sur dix ans, dont 1,7 milliard de l‘État. C’est pour eux une condition sine qua non à un traitement significatif du problème de la précarité énergétique, auquel des réponses sous forme de saupoudrage ou de vernis de surface ne sauraient être satisfaisantes, et pour lequel neuf propositions ont été formulées :
Des dispositions nationales
1- Inscrire dans la loi Besson la lutte contre la précarité énergétique pour définir le cadre d’action.
2- Instaurer un observatoire pour connaître et donner un appui au pilotage national du Plan.
3- Maintenir et renforcer le bouclier énergétique: une dotation énergie pour aider les ménages à faire face aujourd’hui aux dépenses, tout en continuant à faire de l’aide au paiement de factures tant et aussi longtemps que tous les ménages ne seront pas dans des bâtiments performants, classe A ! Il s’agit donc bien d’un dispositif d’aide à la personne. Il y a des dispositifs qui existent (TSS, TPN), mais ce ne sont pas les mêmes règles d’attribution, des énergies en sont exclues. L’idée est d’harmoniser ce système. L’expérimentation à mettre en place dans un premier temps devrait consister à toucher davantage de personnes à travers les dispositifs existants.
4- Inscrire la performance thermique dans les textes indécence/insalubrité pour lutter contre les passoires énergétiques et faire le lien avec les dispositifs santé (PNSE/PRSE) (Bertrand a souligné que le bâton est aussi utile que la carotte parfois… et qu’il faudrait qu’à terme il soit impossible de louer en France des logements en classe G par exemple).
Un dispositif local intégré aux PDALPD et des aides financières nouvelles pour agir durablement sur les logements
5- Mettre en œuvre localement un volet – lutte contre la précarité énergétique dans les PDALPD .
6- Aller à la rencontre des personnes par des visites à domicile pour mieux lier repérage des situations et actions sur les logements.
7- Généraliser et renforcer des Fonds locaux de lutte contre la précarité énergétique pour mieux coordonner les actions et accompagner le ménage jusqu’à la réalisation de travaux .
8- Soutenir ces fonds locaux par un dispositif national de subvention aux travaux économes pour aider les ménages à rendre leur logement performant.
9- Le compléter par un meilleur accès au crédit pour les plus modestes.
L’application de ce plan devrait permettre de rénover 300 000 logements parmi les plus “énergivores” du parc privé entre 2010 et 2020.
Le fonds Ardéchois d’aide aux travaux de maîtrise de l‘énergie
Le dispositif mis en place en 2009 par Polénergie, en partenariat avec le PACT H&D de l’Ardèche et le Conseil Général, et avec le soutien financier de la Région Rhône-Alpes et de l’ADEME, s’inscrit parfaitement dans ce cadre : il s’agit d’un fonds départemental d’aide aux travaux de maîtrise de l‘énergie à destination des foyers à faibles revenus.
Son fonctionnement consiste en une visite préalable à domicile d’un thermicien de Polénergie, dont l’objectif est de réaliser un diagnostic énergétique du logement, mais aussi d’engager une discussion sur les usages de l‘énergie et les économies “facilement” réalisables. Dans un second temps, le PACT H&D est chargé de l‘élaboration du dossier de travaux, basé sur les propositions faites par Polénergie, et de l’accompagnement pour la recherche de financements complémentaires.
Le contenu du rapport du groupe de travail national sur la précarité énergétique ne peut bien évidemment que nous réjouir dans la perspective de faire grossir la goutte d’eau qu’est pour le moment le fonds Ardéchois, dont les objectifs, limités par les financements disponibles, sont d’apporter une aide à 45 ménages en 2010. Espérons maintenant que les mesures qui en découleront seront à la hauteur des ambitions affichées et permettront de faire vivre et de pérenniser les initiatives locales…
Pour plus d’informations sur le fonds Ardéchois d’aide aux travaux de maîtrise de l‘énergie :
Alexandre León : 04 75 35 87 36
leon@polenergie.org
Pour aller plus loin :
Le rapport du groupe de travail national sur la précarité énergétique : télécharger ici